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Tax shelter start-up et exonération fiscale pour les prêts à des entreprises débutantes par le biais du crowdlending

Tax shelter startup crowdlending

Afin de favoriser les investissements dans les PME et les startups, la loi-programme du 10 août 2015 a introduit une réduction fiscale pour les investissements effectués au sein des entreprises qui débutent, plus communément appelées le « tax shelter pour start-up » ainsi qu’une exonération fiscale pour les intérêts des prêts à des entreprises débutantes par le biais d’une plateforme de crowdfunding.

Le tax shelter start-up consiste à accorder une réduction d’impôt à un investisseur (personne physique) investissant, soit directement, soit par le biais d’une plateforme de crowdfunding, au sein d’une PME ou d’une start-up à concurrence de 30 ou 45% de l’investissement réalisé au sein de la PME ou de la startup.

Table des matières

Tax shelter start-up : avantage fiscal et investissement au sein d’une entreprise qui débute

Pour pouvoir bénéficier de cet avantage fiscal, il faut tout d’abord que l’investissement soit réalisé à l’occasion de la constitution d’une société ou d’une augmentation de capital/de capitaux propres dans les quatre ans suivant sa constitution. 

L’administration fiscale a également précisé qu’une société est censée être constituée :

  • à la date de dépôt de l’acte de constitution au greffe du tribunal de l’entreprise ; ou
  • à la date de dépôt d’une formalité similaire dans un autre Etat membre de l’Espace économique européen.

Lorsque l’activité de la société débutante consiste en la continuation d’une activité qui était exercée auparavant par une personne physique ou une personne morale, la société est censée être constituée respectivement :

  • au moment de la première inscription à la Banque-Carrefour des Entreprises par cette personne physique ;
  • ou au moment du dépôt de l’acte de constitution au greffe du tribunal de l’entreprise par cette autre personne morale ;
  • ou de l’accomplissement d’une formalité d’enregistrement similaire dans un autre Etat membre de l’Espace économique européen par cette personne physique ou cette autre personne morale.

Le législateur n’a donc pas réservé cette réduction d’impôt aux investissements effectués dans des sociétés actives dans des secteurs particuliers (sous réserve du respect des conditions listées ci-dessous et de l’exclusion des sociétés immobilières).

 

Tax shelter start-up : pour quels types d’investissement ? 

L’investissement doit être effectué en numéraire (en cash), les investissements en nature ou en industrie ne pourront pas bénéficier de cette réduction fiscale.

De plus, l’investisseur doit recevoir en contrepartie de son investissement de nouvelles actions émises par la société, les titres de dettes ou autres instruments financiers (parts bénéficiaires, warrants, obligations,….) ne seront pas éligibles au tax shelter.

 

Conditions à respecter par la société faisant appel au tax shelter start-up

L’article 145/26 du CIR/92 prévoit toute une série de conditions que la société bénéficiaire de l’investissement doit respecter afin que l’investisseur puisse bénéficier de cet avantage fiscal :

1° la société est une société résidente ou une société dont le principal établissement ou le siège de direction ou d’administration est établi dans un autre Etat membre de l’Espace économique européen et qui dispose d’un établissement belge visé à l’article 229 qui a été constituée au plus tôt le 1er janvier 2013 ;

2° la société n’est pas constituée à l’occasion d’une fusion ou scission de sociétés ;

3° la société est considérée comme petite société sur la base de l’article 1:24, §§ 1er à 6, du Code des sociétés et des associations pour l’exercice d’imposition afférent à la période imposable au cours de laquelle l’apport en capital/capitaux propres a lieu ; 

4° la société n’est pas une société d’investissement, de trésorerie ou de financement ;

5° la société n’est pas une société dont l’objet social principal ou l’activité principale est la construction, l’acquisition, la gestion, l’aménagement, la vente, ou la location de biens immobiliers pour compte propre, ou la détention de participations dans des sociétés ayant un objet similaire, ni une société dans laquelle des biens immobiliers ou autre droits réels sur de tels biens sont placés, dont des personnes physiques qui exercent un mandat ou des fonctions visés à l’article 32, alinéa 1er, 1°, leur conjoint ou leurs enfants lorsque ces personnes ou leur conjoint ont la jouissance légale des revenus de ceux-ci, ont l’usage ;

6° la société n’est pas une société qui a été constituée afin de conclure des contrats de gestion ou d’administration ou qui obtient la plupart de ses bénéfices de contrats de gestion ou d’administration ;

7° la société n’est pas cotée en bourse ;

8° la société n’a pas encore (i) opéré de réduction de capital/capitaux propres, sauf les réductions en vue de compenser une perte subie ou en vue de constituer une réserve pour couvrir une perte prévisible, ou (ii) distribué des dividendes ;

9° la société ne fait pas l’objet d’une procédure collective d’insolvabilité ou ne se trouve pas dans les conditions d’une procédure collective d’insolvabilité ;

10° la société n’utilise pas les sommes perçues pour une distribution de dividendes ou pour l’acquisition d’actions ou parts ni pour consentir des prêts ;

11° la société n’a pas perçu, après le versement des sommes visées au § 1er, alinéa 1er, a et b, par respectivement le contribuable ou le véhicule de financement, ou de l’investissement visé au § 2, alinéa 3, 1°, par un fonds starter public ou une pricaf privée starter, plus que 250.000 euros par le biais de l’application du présent article.

Ces conditions doivent être respectées par la société lors de l’investissement bénéficiant du tax shelter. Cependant, les conditions numéro 4°, 5°, 6° et 10°, doivent être remplies par la société au cours des 48 mois suivant la libération des actions de la société.

Le montant des investissements bénéficiant de cette réduction d’impôt reçus par une société éligible ne peut donc dépasser 250.000 EUR et ce pendant toute la durée de vie de la société

Il faut également que la société soit considérée comme une petite société au sens de l’article 1:24 du code des sociétés et des associations. Il doit donc s’agir d’une société dotée de la personnalité juridique qui, à la date de bilan du dernier exercice clôturé, ne dépasse pas plus d’un des critères suivants :

  • nombre de travailleurs, en moyenne annuelle : 50 ;
  • chiffre d’affaires annuel, hors TVA : 9.000.000 euros ;
  • total du bilan : 4.500.000 euros.

Les sociétés qui commencent leurs activités doivent estimer de bonne foi ces critères au début de l’exercice comptable. S’il ressort de cette estimation que plus d’un des critères seront dépassés au cours du premier exercice, il faut en tenir compte dès ce premier exercice. Ceci implique que si, au vu du plan financier, il devait d’emblée s’avérer que les seuils seront franchis dès le début, la société ne pourra pas être considérée comme petite.

 

Tax shelter start-up : quelles sont les conditions à respecter par l’investisseur ?

Pour pouvoir bénéficier de cette réduction, l’investisseur doit être une personne physique assujettie à l’impôt des personnes physiques ou à l’impôt des non-résidents en Belgique. 

Cette mesure ne s’adresse donc pas aux investissements effectués par une société dans une autre société.

Un dirigeant d’entreprise (administrateurs, liquidateurs, fonctions analogues, directeurs indépendants,…) ne pourra pas bénéficier de cette mesure pour les investissements qu’il réalisera au sein de sa propre société. 

En revanche, s’il décide d’investir au sein d’une autre société dans lequel il n’exerce pas de fonction de dirigeant d’entreprise, il pourra alors bénéficier de cette réduction fiscale pour cet investissement. 

L’administration fiscale a toutefois admis qu’un dirigeant d’entreprise peut toutefois bénéficier de la réduction d’impôt pour autant que : 

  1. sa nomination ne soit pas prévue dans l’acte d’apport ; et 
  2. il ne soit pas rémunéré.

L’investissement réalisé par l’investisseur et bénéficiant de cette réduction d’impôt ne pourra pas représenter plus de 30 % de l’actionnariat de la société.

De même, l’investisseur devra conserver sa participation au sein de la société pendant un délai de 48 mois à compter de l’investissement au sein de la société. 

A défaut, l’avantage fiscal obtenu sera réduit à concurrence de la période restant à courir pour atteindre les 48 mois de détention.

 

Quel est l’avantage fiscal octroyé par le tax shelter start-up ? 

En contrepartie de son investissement, la personne physique se verra octroyer une réduction d’impôt égale à 30% du montant investi au sein de la société débutante

Toutefois, ce montant est limité à 100.000 EUR par période imposable et par contribuable

L’investissement ne doit pas nécessairement être effectué dans une seule société, l’investisseur peut investir dans plusieurs sociétés et bénéficier de cette mesure pour autant que le montant de ses investissements bénéficiant de cette réduction d’impôt ne dépasse pas 100.000 EUR par période imposable. 

Cette réduction d’impôt peut être portée à 45% du montant investi si la société dans laquelle l’investisseur décide d’investir est considérée comme une microsociété

Pour être considérée comme une microsociété, il faut que lors du dernier exercice comptable clôturé la société ne dépasse pas plus d’une des limites suivantes :

  • le total du bilan n’est pas supérieur à 350.000 euros ;
  • le chiffre d’affaires, hors TVA, n’est pas supérieur à 700.000 euros ;
  • la moyenne des travailleurs pendant l’année n’est pas supérieure à 10.

Enfin, cette réduction fiscale obtenue par l’investisseur ne pourra être ni remboursée ni reportée sur une période imposable ultérieure au cas où faute d’impôts suffisants à payer pour l’investisseur, elle ne pourrait être entièrement imputée. 

 

Exemple 

Deux fondateurs décident de constituer ensemble une société. Après un an, ils décident de lever des fonds pour développer leur société. Un investisseur privé est intéressé et décide d’investir 100.000 EUR au sein de la société. Il ne sera toutefois pas nommé administrateur de cette société. Lors de cet investissement, la société est considérée comme une microsociété. Dès lors l’investisseur obtiendra une réduction d’impôt égale à 45.000 EUR.

Si l’investisseur doit payer pour la période imposable lors de laquelle il réalise cet investissement un montant d’impôt égal à 40.000 EUR, le montant de la réduction fiscale obtenue pour cet investissement sera réduit à due concurrence. Les 5.000 EUR non imputés ne pourront pas être reportés à la période imposable suivante et ne seront pas non plus remboursés par l’état à l’investisseur.

Un an après cet investissement, la société réalise une seconde levée de fonds auprès de nouveaux investisseurs privés pour un montant de 200.000 EUR. 

Ces nouveaux investisseurs privés ne pourront bénéficier du tax shelter sur leurs investissements qu’à hauteur de 150.000 EUR, puisque la société ne peut recevoir d’investissements éligible à cette réduction d’impôts que pour un montant total de 250.000 EUR, et ce pendant toute la durée de vie de la société.

 

Exonération fiscale pour les intérêts des prêts à des entreprises débutantes par le biais d’une plateforme de crowdfunding 

La loi-programme du 10 août 2015 a également introduit, outre le « tax shelter pour les startups », une autre mesure tendant à favoriser les entreprises débutantes : l’exonération de précompte mobilier pour les intérêts des prêts à des entreprises débutantes par le biais d’une plateforme de crowdfunding.

Entreprises débutantes : conditions pour l’exonération du précompte mobilier sur les prêts octroyés par le biais de plateformes de crowdfunding

Les conditions à remplir pour bénéficier de cette mesure sont prévues à l’article 21, 13° du CIR 92 : 

  • le prêt doit être fourni par une personne physique (et non une société) ;
  • le prêt doit être effectué au profit d’une société débutante. Pour ce critère nous renvoyons aux explications reprises ci-dessus pour ce qui concerne le tax shelter pour les startups ;
  • le prêt doit être effectué au profit d’une petite société au sens de l’article 1:24 du code des sociétés et des associations. Là encore nous renvoyons aux développements repris ci-dessus en matière de tax shelter startups. Notez cependant que pour cette exonération fiscale, le législateur n’a pas fait de distinction entre une petite société et une microsociété ;
  • le prêt est conclu sur la base de l’octroi d’un intérêt annuel pour une durée d’au moins quatre années ;
  • le prêt s’effectue avec l’intervention d’une plateforme de crowdfunding agréée par la FSMA ou par une autorité similaire d’un autre Etat-membre de l’Espace économique européen ;
  • il ne doit pas s’agir de prêts de refinancement.

Entreprises débutantes: activités et objet du financement

Contrairement au tax shelter pour les startups, aucune condition (limitative) n’est posée en ce qui concerne les activités que l’emprunteur peut exercer

Il est uniquement précisé que les prêts octroyés doivent servir à financer des initiatives économiques nouvelles. L’exposé des motifs ne fournit aucune indication ni aucun exemple de ce qu’il faut entendre par de telles “initiatives économiques nouvelles”. On peut supposer qu’il appartiendra à la plateforme de crowdfunding d’effectuer une sélection à cet égard.

Les dirigeants peuvent bénéficier de l’exonération de précompte mobilier pour les intérêts des prêts accordés à leurs propres entreprises débutantes par le biais d’une plateforme de crowdfunding 

Contrairement au tax shelter pour les start-ups, dans le cadre de cette exonération les dirigeants d’entreprise ne sont pas exclus de cette mesure

Les dirigeants d’entreprises peuvent donc prêter des fonds à leur société et bénéficier de l’exonération fiscale des intérêts (pour autant que les conditions reprises ci-dessus soient toutes respectées). 

Cette précision est confirmée explicitement par l’exposé des motifs de la loi : « les entrepreneurs et les dirigeants de l’entreprise agissant à titre privé peuvent également ­bénéficier de l’exonération ».

En cas de respect de ces conditions, le prêteur bénéficiera d’un avantage fiscal sous la forme d’une exonération de précompte mobilier sur les intérêts des premiers 15.860 euros (montant indexé pour l’exercice d’imposition 2021) prêtés par an, et ce pendant quatre ans. Seuls les intérêts des quatre premières années peuvent donc bénéficier de l’exonération.

A propos des auteurs : Thomas Daenen et Clément Pirenne

Thomas Daenen est avocat associé au sein du cabinet d’avocats Beyond. Clément Pirenne est avocat au sein du cabinet d’avocats Beyond

Ils sont spécialisés dans les domaines du droit des sociétés et du droit de l’entreprise. Clément Pirenne est titulaire d’un master complémentaire en droit fiscal et spécialisé dans cette matière. Beyond a développé une large expérience dans le conseil, l’accompagnement et la défense de start-ups et scale-ups, notamment dans le domaine des levées de fonds mais également en propriété intellectuelle, protection de la vie privée et droit commercial.